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publié le 17 octobre 2018
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Sommaire de la fiche :
Résumé

Le centre social, les centres sociaux sont ouverts à toutes et à tous. Cependant, tout le monde ne vient pas au centre social, pour diverses raisons:  » Cela ne m’intéresse pas, ce n’est pas ouvert quand j’en ai besoin, etc … » Cependant, nous posons-nous la question : « Est-ce que ce que nous mettons en place … laisse une place à chacun ? ».

Le centre social « Hors les murs » est une idée d’habitants, devenue ensuite projet d’habitants mis en oeuvre par les bénévoles et les professionnels … qui est devenu un projet de structure … projet qui a changé profondément les pratiques d’accompagnement et les postures professionnelles

L'action en images

Quelle est la situation de départ qui a motivé le projet ?

L’expérience qui va vous être relatée est née d’une préoccupation d’habitants, plutôt de plusieurs préoccupations qui se recoupent autour de quelques phrases qui pourraient être formulées de la façon suivante : « on communique mal sur ce qui se passe au centre social », « je vis/nous vivons des choses qui me/nous font du bien au centre social et cela pourrait profiter à d’autres », « le mot social est entendu autour de cas social, et des gens ne viendront pas au centre social du fait de cette interprétation du mot social » …

Cela est rapidement écrit, de manière un peu caricaturale, mais à chaque comité d’usagers, quelque soit l’ordre du jour, immanquablement les discussions se centraient très rapidement sur ces préoccupations. Au fil des échanges, au fil des discussions, à partir de certaines propositions qui pourront être perçues comme radicales, à savoir : « de toutes façons, pour certains, pour qu’ils viennent au centre social, il faudra aller les chercher chez eux (sous entendu … de manière un peu forcée) », l’idée a pris forme de faire le centre social dehors, dans l’espace public, devant « chez les gens ». Mais pas n’importe comment, il fallait réussir à faire le centre social tel qu’il est dans les murs, pour devenir ce qui s’appellera le centre social « Hors les murs », avec son espace accueil, l’espace petite enfance, différents ateliers … .

Un collectif d’une quinzaine d’habitants s’est donc fédéré autour de cette idée. Nous sommes fin 2014 …

Qu'avez-vous mis en place ?

Mettre le centre social « Hors les murs » a fait naître de nombreuses questions :

  • Les conditions pour investir l’espace public, y en a-t-il ?
  • Faut-il demander des autorisations ?
  • Les règles d’hygiène pour un atelier cuisine « Hors les murs » …
  • Les questions de sécurité et de responsabilité

Si l’idée d’être dehors a mobilisé rapidement, cette idée a aussi de la même manière généré une certaine incertitude.

Nous nous sommes intéressés à ce que propose Laurent Ott avec son association Intermèdes Robinson (http://www.intermedes-robinson.org/index.php/category/blog/). L’expérience de ces ateliers de rue autour de la pédagogie sociale semblait répondre en partie du moins aux questions qui se présentaient à nous.

En juin 2015, nous avons donc mis en place 2 jours de formations pour les bénévoles et les professionnels autour de la pédagogie sociale avec des temps pour expliquer ce que nous avions en tête et commencer à construire les réponses aux problèmes qui se présentaient à nous.

2 jours de formations … pour quoi faire ? Pour relativiser les contraintes liées à l’investissement de l’espace public, découvrir d’autres postures d’accompagnement, comprendre la notion de communauté, repenser la notion de travail et de ce que l’on produit, des traces que l’on laissent dans l’espace public. Cela a été riche, intense et fondateur, et a réinterrogé le travail associé au sein du centre social. 25 personnes ont été formées lors de la première session (10 professionnels et 15 bénévoles).

Au-delà de la formation, sur la période de Janvier à Juin, les rencontres de travail ont été très régulières :

  • Que voulons nous proposer ?
  • Quel type de matériel ?
  • Quel type de communication ? Comment informer les personnes, les habitants des quartier que nous allons nous installer devant chez eux
  • Où nous installer ?

Les premiers pas « Hors les murs » : des ‘cafés au bout de la rue’ ont été mis en place, à la sortie des écoles, le samedi matin. Dans différents quartiers, sur ce que nous avions repéré comme des lieux de passage. L’idée était de s’installer et de proposer, autour du café, une discussion pour présenter ce que nous avions l’intention de faire et aussi recueillir les idées de chacun. Un vingtaine de ‘cafés au bout de la rue’ ont été mis en place sur la période de mai et juin 2015. 3 à 5 personnes animaient ces espaces avec une majorité de bénévoles la plupart du temps.

Et enfin la première version du centre social « Hors les murs » …  qui s’est concrétisée à l’été 2015. Tout le centre social était donc sorti de ses murs, avec un espace accueil, un espace petite enfance, un espace loisirs créatif, etc …  Cette première approche a généré beaucoup d’énergie, elle en a demandé beaucoup aussi. Sortir et ranger le centre social tous les jours de l’été (parfois à 2 endroits en même temps) était en quelque sorte une petite folie, mais ce qui se passait « Hors les murs » proposait autre chose. Une relation de nature différente avec et entre les personnes. « Hors les murs », on n’accueille pas au centre social, on est accueilli là où l’on s’installe. Si dans nos ateliers nous avons rencontré des gens qui venaient au centre social, beaucoup n’y étaient jamais venus. Cette première saison du « Hors les murs » a vu aussi l’écriture collective d’un livre avec plus de 120 contributions. Ce livre a été tiré à 250 exemplaires. Un effort de ritualisation du temps passé « Hors les murs » a été fait avec notamment le pivot du temps du goûter et son temps de discussion, temps qui est parfois devenu un temps de « café philo ».

Jamais, il n’a été question de faire de l’approche « Hors les murs » un avant-poste de recrutement pour le centre social, il s’agissait de montrer et partager. Cette réussite (en terme qualitatif et quantitatif), ce « travailler ensemble », a généré une relation différente entre bénévoles et professionnels, elle a eu un impact fondateur sur la façon dont les gens se représentait le centre social et les opportunités qu’il proposait. On peut faire des choses au centre social, petites … ou grandes.

Une réunion d’équipe hebdomadaire était mise en place, en plus des temps de calage quotidien.

3 temps de bilan ont été planifiés. Le premier a eu lieu tout de suite après l’été, en équipe (bénévoles et professionnels): qu’est-ce que l’on retient de tout cela ? et surtout quels sont nos points forts et ce qu’il faut retravailler? A partir de ce temps, 2 demi-journées ont été mises en place avec Laurent Ott, pour regarder le travail que l’on avait fait ensemble et préparer la suite.

3 ans plus tard, l’équipe de bénévoles et de professionnels continue de mettre en place, sur la période estivale, le centre social « Hors les murs ». Toutefois, on parle davantage d’ateliers de rue. Si la version estivale est encore finalement assez proche de ce qui se faisait au début, il y a maintenant 6 ateliers de rue hebdomadaires, toute l’année. Aux mêmes endroits, quelque soit le temps. 4 sont mis en place en fin d’après midi, sur le chemin du retour de l’école. Et 2 sont mis en place en soirée le jeudi et le vendredi de 18h à 20h, le public visé étant le public ados qui ne fréquente pas les structures.

Quelles ont été les étapes clés du projet ?

  • Fin 2014
    Vers le Centre social Hors les murs

    Après plusieurs temps d'échanges, l'idée est devenue plus précise. Nous allons nous organiser pour faire le centre social "Hors les murs", l'été prochain

  • De janvier à Juin
    6 mois
    On s'organise

    Plusieurs temps de travail pour réfléchir ensemble à ce que nous allons mettre en place

  • Mai et Juin 2015
    Des cafés au bout de la rue

    Des cafés au bout de la rue sont mis en place afin d'aller à la rencontre des habitants pour partager ce que nous souhaitons faire et recueillir les idées, les attentes, les envies ...

  • Juin 2015
    2 Jours
    On se forme

    2 journées de formation pour s'initier à la pédagogie sociale et découvrir la pratique de l'association Intermedes Robinson

  • Juillet et Août 2015
    Le centre social "Hors les murs"

    Tous les jours de l'été 2015, 15 bénévoles et 10 professionnels ont investi l'espace public avec le projet centre social "Hors les murs", parfois à 2 endroits en même temps

  • Septembre à novembre 2015
    2 jours
    On regarde ce que l'on a fait !

    Une journée de bilan en équipe " à chaud", ce que nous avons réussi, ce qu'il faut repenser, etc ... Et 2 demi-journées accompagnées par L. Ott à partir de travail de la première journée de bilan

  • Etés 2016-2018
    Centre social hors les murs / Ateliers de rue

    Pendant l'été, 4 ateliers mis en place en fin d'après midi, sur le chemin du retour de l'école. Et 2 sont mis en place en soirée le jeudi et le vendredi de 18h à 20h, le public visé étant le public ados qui ne fréquente pas les structures.

  • Octobre 2016
    2 jours
    En immersion avec Intermedes Robinson

    Une délégation de 8 personnes (4 professionnels et 4 bénévoles) en immersion avec les équipes de L. Ott à Chilly-Mazarin (Ateliers de rue dans les bidonvilles, au coeur des cités, ...)

  • Décembre 2017
    1 journée
    Regards sur les pratiques

    Avec le centre social de Lillers, temps de travail coopératif des 2 centres sociaux avec bénévoles et professionnels. Travaux accompagnées par L. Ott et Luis Garcia (autour de la pédagogie de Paolo Freire)

Quels moyens ont été mis en oeuvre ?

Mise en place des équipes et rôle de chacun

Une communauté de destin (à opposer à une communauté d’appartenance) s’est donc créée autour de cette idée. 10 professionnels et 15 bénévoles.

Il n’y avait pas de différence entre salariés et bénévoles, chacun prenant les responsabilités qu’il jugeait utile de prendre. La répartition des rôles se fait de façon concertée. Chacun participe à l’effort logistique.

 

Mise en place des moyens logistiques et financiers

Cette première idée a été soutenue dans le cadre de la politique de la ville et par la CAF dans le cadre du REAAP.

Ceci a permis de financer l’accompagnement de Laurent Ott et l’investissement dans du matériel spécifique pour le « Hors les murs » : tables pliantes, tonnelles, bâches, … et aussi du matériel pédagogique.

Ces fonds ont aussi financé la participation d’un écrivain et d’un dessinateur pour l’écriture du livre.

Place des partenaires et du centre social dans le projet

Les partenaires « traditionnels » ont observé de manière assez précise ce qui s’est fait sur cette approche, sans toutefois y participer. Le Facebook dédié au déroulement et à l’information autour du premier centre social « Hors les murs » a été très suivi. Ce projet a généré beaucoup d’intérêt notamment au travers des commissions thématiques mises en place dans le cadre du projet social.

En conclusion

Quel(s) résultat(s) de l'action ?

Une obligation de moyens (et finalement de posture), plus qu’une obligation de résultats … Des financements ont été sollicités auprès de la CAF et de la politique de la ville pour lancer cette dynamique. Des indicateurs et des critères traditionnels ont été mis en place (nombre de participants, nombre de rencontres de travail, …), ceci était avant tout un exercice de forme plutôt que de fond.

Dans cette phase d’écriture commencé fin 2014, il a été impossible d’anticiper la façon dont les choses allaient se passer. Nous avons appris à penser les projets à partir des éléments sur lesquels nous avons prise. Par exemple, si nous voulons améliorer la convivialité, c’est notre convivialité que l’on va améliorer. Il est difficile de dire : » nous avons pour objectif qu’il y ait 50 nouvelles personnes sur le projet Hors les Murs ». Par contre, dire que nous sortirons X fois, sur des horaires identifiés et que nous le ferons quelque soit le temps, ce sont des éléments sur lesquels nous pouvons agir. Dans les faits, avec cette approche, il y a toujours du monde dans et autour des projets, dans la mesure où ce sont les envies d’agir des personnes qui sont mises en oeuvre.

Evolution de la nature de la relation bénévole/professionnel … De la même manière, l’impact positif sur la relation bénévole / professionnel n’était pas envisagé. Le fait de travailler ensemble, d’être dans une certaine mesure dans la même « galère » (sortir et ranger le centre social tous les jours par exemple), de décider ensemble de tout, d’être dans une logique de complémentarité plutôt que de carence… Ces éléments ont refondé les pratiques de travail associé dans le centre social.

Evolution des postures professionnelles … vers de nouveaux métiers … autour de la pédagogie sociale et de l’accompagnement du DPA. Ceci est précisé rapidement en amont. La place du professionnel a été questionnée fortement. Certains pouvaient se dire, mais « il n’ont pas/plus besoin de nous ». La place du professionnel évolue, moins animateur pour, surtout pas expert à la place de … davantage médiateur, tisseur … mailleur (d’idées, de collectifs, …)

Evolution du « Hors les Murs » vers l’atelier de rue … : de l’animation et la communication à la relation et l’accompagnement . Plus de 3 ans après la première forme de centre social « Hors les murs », il y a aujourd’hui 6 ateliers de rue hebdomadaires mis en place toute l’année, aux mêmes endroits et quasiment toujours à la même heure (les ateliers de rue pendant les vacances scolaires peuvent bouger en terme d’horaires). 4 sont mis en place sur le chemin de l’école de 16h45 à 17h45 et 2 sont mis en place de 18h à 20h à destination du public ado et jeune adulte. 3 principes guident ces approches : La permanence de la présence, l’inconditionnalité de l’accueil et de la confiance qui se donne.

Cette approche a aussi simplifié nombres de choses, le travail intergénérationnel, s’est fait dans une simplicité extraordinaire, l’échanges des savoirs, la prise de responsabilité, la participation aux décisions, … Ceci a pris de la force autour du projet centre social « Hors les murs », et se décline maintenant dans toutes les dimensions du projet social.

De plus, l’approche « Hors les murs » s’est déclinée autour d’autres projets qui ont eu une influence forte sur les projets sociaux des centres sociaux de Mazingarbe : Le ‘repair café’ avec la mise en place de la ‘repair mobile’ et le magasin gratuit avec sa déclinaison Hors les murs.

L'action va-t-elle se poursuivre ?

Aujourd’hui les ateliers de rue/Ateliers éducatifs de rue existent toute l’année. Certes, ils sont chronophages et énergivores, cependant rien d’autre d’aussi efficient n’a été mis en place dans notre contexte. C’est d’une certaine manière difficile de sortir aussi régulièrement sans qu’il y ait une véritable équipe dédiée. Cependant ce qui se passe « Hors les murs » est aussi énergisant, cela permet aussi d’être en prise directe avec l’ambiance du quartier, autant dans les envies d’agir que dans les problèmes qui se présentent. De plus, sans que l’on sache vraiment pourquoi, la fréquentation d’un atelier peut baisser pendant quelques semaines et remonter aussi soudainement. Cette action, cette posture sera donc maintenue aussi longtemps que les acteurs le jugeront nécessaire, même si les évolutions sont régulières et la recherche de moyens pour renforcer les équipes est, elle, constante.

Quelles améliorations souhaiteriez-vous apporter au projet ?

Les améliorations se construisent au fil de l’eau pour la forme de l’atelier, en étant à l’écoute des personnes qui fréquentent les ateliers et des bénévoles qui s’y investissent régulièrement.

Attention à mieux conscientiser le chemin parcouru … les temps d’analyse des pratiques, de « regards sur », existent mais ils sont mis en place quand il y a un peu de temps pour le faire. Ceux-ci devraient être repérés dans l’année. Les postures qui ont été initiées « Hors les murs » se déclinent toute l’année sur différents projets. Il convient de mettre les moyens suffisants en terme d’analyse et d’accompagnement.

Laisser davantage de traces … des expos photos, des livres, des fresques, des portraits, ont été réalisés « Hors les murs », ils ne sont pas suffisamment valorisés, et pas systématiques. Ces 2 points font partie des axes de réflexion qui sont en cours.

 

Quels conseils donneriez-vous à des personnes qui voudraient suivre vos traces ?

Aucun, nous sommes partis d’un point et il était impossible d’envisager à quel point les pratiques seraient repensées à partir de cette approche. Il n’y avait pas de recette et d’ambition stratégique de structure. Il s’agit simplement d’accompagner une envie d’agir d’habitants à partir de ce qui a du sens pour eux. L’équipe de professionnels a été emportée par la dynamique. De la même manière, il n’y a pas eu de freins de la collectivité de référence. Nous n’avons pas demandé la permission pour mettre en place le centre social « Hors les murs », nous avons informé la mairie que nous allions mettre en place ce projet. Celui-ci a été bien accueilli, mais nous l’aurions fait même s’il y avait eu une réticence. Quand le projet a été présenté en conseil d’administration, l’enthousiasme était relatif. C’est l’énergie de ce premier groupe d’habitants qui a permis de la réussite et a favorisé la pérennité de la dynamique.

Donc il n’y a pas de conseil à suivre le mode opératoire qui s’est construit à Mazingarbe, nous pouvons partager ce qui commence à être un des piliers de notre intervention « Hors les murs ». Les conditions repérées :

  • Être là (vraiment) !
  • Permanence de la présence et inconditionnalité de l’accueil
  • Travailler ensemble …… à partir de ce qui a du sens pour les personnes concernées (dans la temporalité des personnes)
  • Considérer les personnes telles qu’elles sont et pas telles que l’on voudrait qu’elles soient ! (Pas de préalable à …)
  • … et tout ce qui nous reste à découvrir
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